Philippe Duhamel - Guide de haute montagne | J’ai testé l’artif … et j’ai aimé !

Dans mon petit monde, l’artif’ servait juste à se tirer d’affaire dans une longueur de libre, en gros à tirer (comme un sauvage) sur un point – un point béton de préférence, même s’il m’est ~~parfois~~ souvent arrivé de ne pas réfléchir sur sa nature avant de ~~tirer~~ me jeter dessus – pour passer un pas délicat et ne pas risquer, en cas de zipette malencontreuse, de transformer les parties non couvertes de mon corps en pizza …

Pour ceux qui veulent un schéma, mise en situation : te voilà dans le crux d’une longueur et tu sens que négocier le passage difficile en libre n’est pas pour aujourdh’hui, tu vas donc passer en artif’. Tu check subtilement si l’assureur te vois depuis le relais. De cette prise d’information s’ensuivent deux solutions :
Petit 1 : Il te lâche pas des yeux et calcule que tu es en difficulté … tu avales ton orgueil, sors un gros « @#%&! chui mort … j’ai mangé une tartiflette hier soir et l’heure tourne » et hop, tu choppes le point – voir même tu mets le doigt dans le spit/piton – beugle comme un veau (pour faire croire que ce passage est bien chaud, même en tirant sur le point) et te hisses honteusement au dessus.
Petit 2 : Un heureux ressaut te cache de la vue du binôme ou bien il est trop absorbé par la cordée féminine évoluant dans une voie parallèle ou bien il vérifie son statut Facebook …. bref, il te voit pas et silencieusement tu te crispes sur la dégaine pour chopper le bac suivant. Pas vu, pas pris … Si après coup il te demande comment tu as fais pour passer le point, un réponse très évasive sortira de ta bouche.

Voilà ma définition de l’artif’, j’exagère un peu 😉 … mais ça c’était avant ! Avant que Fred me propose de découvrir le VRAI artif’, celui de Bonatti au Drus (rien que ça !), celui qui fait mal … mal aux doigts à cause du marteau, mal au dos à cause du sac trop lourd, mal au bassin à cause du baudrier trop sérré et mal au moral -surtout!- devant la vitesse de progression.

Pour ce weekend, direction une petite paroi de 15 mètres dans le secteur de la Grande Jeanne près d’Annecy. Equipement, hissage, dééséquipement … Fred m’a initié à toute les manips. C’est vraiment un univers particulier, tu es comme dans une bulle, pendu dans le baudrier à grignoter la paroi mètre après mètre … même si avoir confiance dans ses points n’est pas quelque chose d’acquis 🙂 Bref, une top découverte même si – à premières impressions – l’artif’ restera pour moi comme une activité solitaire, à faire en auto assurage. Quand tu grimpes c’est bien, quand t’attends 3 heures que le binôme progresse c’est déjà beaucoup moins excitant.

On finira la journée par une petite grande voie pépère au dessus du lac … grimpe en tee shirt au soleil. J’aime le retour du printemps.